En janvier 2022, pour la Semaine du Son, le collectif Pepason organisait à Lyon un forum des paysagistes sonores. Une réussite, selon Arthur Enguehard, l’un des principaux animateurs de l’association : « Notre but était de créer du lien entre les praticiens, une solidarité au sein de cette communauté ; je crois que c’est une mission accomplie » se réjouit-il.
A l’occasion de la Semaine du Son de 2023, Pepason organise une troisième édition de son forum, le 28 janvier, à nouveau au Périscope, à Lyon. Mais l’association ne s’arrête pas là et organise également deux tables rondes : « Paysages sonores et écologies militantes : Quelles synergies ? », le 21 janvier au Shakirail (Paris), et « Ecrire les paysages sonores », le 27 janvier à la bibliothèque universitaire Chevreul (Lyon).
Ces trois événements attestent d’une réelle volonté de faire tomber des barrières. Le forum, par exemple, sera marqué par la contribution d’institutions comme le Grame de Lyon (Grame signifiant « Générateur de Ressources et d’Activités Musicales Exploratoires ») ou le Cresson de Grenoble (Cresson se traduisant par « Centre de recherche sur l’espace sonore et l’environnement urbain »). « Nous essayons de créer des ponts entre des milieux très divers qui s’intéressent aux paysages sonores (recherches de diverses disciplines, arts sonores autant que plastiques, actions des territoires, éducatives et culturelles…) et on sent que tout le monde est friand de ce genre d’opportunités » explique Arthur Enguehard.
Arthur Enguehard donne un autre exemple de ces rapprochements prometteurs : « Nous étions aux assises du bruit avec Gilles Malatray début octobre. Elles sont organisées par le Centre d’Information du Bruit, le CIDB. Le propos, globalement, est vraiment centré sur les nuisances sonores. Nous avons fait une conférence autour des paysages sonores, avec l’approche anthropologique et transverse (Gilles dirait « indisciplinée » en écho à Myriam Suchet) qui est la nôtre. Le retour a été excellent. On sent que les milieux de l’acoustique ont envie d’intégrer de nouvelles manières d’agir ou qu’il cherchent des complémentarités à leur travail dans les approches qui viennent des arts et des sciences humaines. Je crois que c’est l’une des belles évolutions qu’on peut noter en ce moment. »
Le rendez-vous parisien est l’occasion d’enfin rencontrer un autre public, celui des militants écologistes. Précédé d’une balade sonore dans le Parc de La Villette, l’événement se fait en partenariat avec de nombreux acteurs : le Graine d’Ile-de-France (le maillon local d’un réseau d’éducation à l’environnement), la Philharmonie de Paris, le Shakirail (un lieu culturel et solidaire du dix-huitième arrondissement de Paris)… La table ronde, en particulier, permettra en effet de réunir l’essayiste Juliette Volcler, l’universitaire Makis Solomos et des représentants du mouvement citoyen Alternatiba autour de créations sonores.
« Parmi les gens qui gravitent dans le milieu des paysages sonores, en tout cas autour de nous, je crois que tout le monde est convaincu de la dimension écologique, voire radicale, de l’écoute » explique Arthur Enguehard. « Par contre, on s’est rendu compte que ce n’est pas du tout évident pour d’autres communautés culturelles qui revendiquent un attachement à l’écologie. Souvent, quand on propose de parler de paysages sonores, les gens ne voient pas le lien avec l’écologie. On prend conscience que nos pratiques sont particulières, qu’elles sont propres à une communauté souvent constituée d’artistes ou de chercheurs, des personnes qui ont un certain sens du temps, un certain type de culture, un certain type d’affinité avec le son… Je crois que si nous voulons vraiment que les arts sonores et les pratiques d’écoute liées aux paysages sonores changent la société, transforment le monde comme nous pensons qu’elle le peuvent, il ne faut pas chercher à ce que tout le monde fasse comme nous. Il faut plutôt favoriser une réappropriation par les autres communautés de ce que nous avons à proposer. Ensemble, on va créer des synergies. On ne cherche pas l’union, on ne cherche pas à se mettre tous sous le même drapeau. Nous sommes des communautés culturelles distinctes mais avec des enjeux communs. »
« Je sens que la préoccupation du sonore est vraiment croissante. Le confinement a changé quelque chose. Le problème est juste que le temps est long entre la prise de conscience (« Ah, attends, le son, c’est marrant ») et le lancement d’initiatives qui tiennent sur le temps long » conclut Arthur Enguehard.
Image de têtière : François Mauger
Pour aller plus loin... Le site web de Pepason Le site web de la Semaine du Son Le site web du réseau Graine Le site web d'Alternatiba Le site web du Grame de Lyon le site web du Cresson de Grenoble