De quoi est fait votre instrument ? De bois ? De plastique ? D’écaille de tortue ? La question aurait bien peu d’importance s’il ne se vendait pas en France chaque année plus d’un million d’instruments neufs. Mais, à cette échelle, la problématique des matières premières n’a plus rien d’anecdotique. Petit tout d’horizon des solutions…
La première, la plus simple, est la commercialisation d’instruments d’occasion. Une étude publiée en juin 2018 par la Chambre syndicale de la facture instrumentale (CSFI) révèle qu’il s’en vend chaque année 400 000, ce qui représente le quart du marché.
Une autre est l’utilisation de matières premières locales. Le projet « Leonardo Guitar Research » cherche à promouvoir l’utilisation d’essences de bois durables et non tropicales dans la construction des guitares acoustiques et classiques. L’une de ses méthodes est le test à l’aveugle : les musiciens sont invités à essayer sans les voir deux instruments, l’un taillé dans des bois tropicaux, l’autre issu d’essences locales. La plupart des instrumentistes ne perçoivent pas la différence. Mais, lorsqu’ils retrouvent la vue, ils préfèrent généralement les bois tropicaux, plus conformes à l’idée qu’ils se font de leur instrument. C’est cet imaginaire qu’il va falloir faire évoluer…
Une autre solution à la raréfaction des matières premières est le réemploi de bois qui ont connu une première vie. Gildas Vaugrenard, artisan installé à 50 kilomètres au sud de Saint-Brieuc et membre de la « confrérie des luthiers pas ordinaires », taille ses guitares électriques dans le bois d’un ancien tonneau de cognac ou d’une armoire en châtaigner. 80 kilomètres plus à l’ouest, Arnaud Haushalter s’approvisionne à la ressourcerie Ti Récup’ de Carhaix en meubles de toutes sortes qu’il démonte puis met un mois à transformer en guitare.
Il est également possible d’expérimenter avec de nouvelles matières. Outre des essences locales (noyer, érable…), le luthier rennais Fred Kopo utilise pour ses guitares la fibre de lin, un matériau composite utilisé dans la construction navale, dont la sonorité lui semble bien plus proche de celle du bois que celle des matières plastiques que l’industrie chimique promeut. Vénérable maison fondée en 1825, spécialisée dans la fabrication d’instruments à vent, Buffet-Crampon a de son côté lancé une gamme d’instruments, la « Green line », exploitant un matériau composite en grande partie issu des chutes de bois collectées dans ses ateliers.
Pour peu que les instrumentistes l’acceptent, tout – ou presque – reste à expérimenter en matière de lutherie…
Photo : Cénel et François Mauger
Pour aller plus loin... https://www.irma.asso.fr/Il-existe-un-grand-ecart-entre-la https://www.lalettredumusicien.fr/s/articles/6044_318_la-facture-dinstruments-se-reinvente-pour-repondre-aux-normes-ecologiques?idarticle=6044 https://blog.francetvinfo.fr/ondes-positives/2019/04/27/langonnet-le-luthier-transforment-de-vieux-meubles-en-guitares-electriques.html https://www.csfi-musique.fr/reglementations/les-actions-des-fabricants/leonardo-guitar-research-project http://www.eco-bretons.info/dans-le-centre-bretagne-des-guitares-uniques-et-ecologiques/