« La réponse était au-delà de nos attentes les plus folles » confesse Sarah Bird, la directrice du Timber Festival. Voyant, au printemps 2020, que l’événement estival anglais ne pourrait pas avoir lieu du fait du Covid, elle avait imaginé avec son équipe une autre façon de se connecter aux autres et à la nature. En mai2020, le Timber Festival a en effet invité tous ceux qui le souhaitaient à contribuer à une carte sonore des forêts du monde. Et très vite, des dizaines d’enregistrements de sous-bois et de fourrés touffus lui sont parvenus.
« Nous avons été submergés par le nombre de personnes qui se sont impliquées et surpris qu’elles viennent du monde entier » se souvient-elle. « Nous avons réalisé assez rapidement que ce projet avait déchaîné l’imagination des gens. Nous avons été très émus lorsque certains nous ont contactés pour nous raconter de façon personnelle à quel point ils sont liés aux forêts. Nous avons également commencé à réaliser que cette carte sonore est une archive, un portrait audio de forêts menacées par les impacts du changement climatique. Déjà, certaines de ces forêts ont subi l’assaut d’incendies sauvages ou ont été décimées par l’exploitation forestière industrielle ».
La carte est toujours présente sur le site du Timber Festival. D’un simple mouvement de souris, elle permet de passer de chants d’oiseaux dans la Serra de Monchique, au Portugal, au son de la pluie dans un recoin du Riding Mountain National Park, dans le Manitoba, au Canada. Bien sûr, de vastes zones restent à couvrir, du Kazakhstan à la péninsule de Kamtchatka ou du Maroc à la Somalie. Mais c’est tout l’intérêt du projet : il ne cesse d’évoluer. En quelques minutes, tout internaute peut y ajouter le son de la forêt qu’il vient de traverser.
« Une partie importante du projet était pour nous d’encourager les artistes à réagir aux sons » ajoute Sarah, qui se dit « pleinement consciente que les arts sont une opportunité unique de parler aux cœurs et aux esprits d’avenirs plus soutenables ». Trois artistes se sont déjà inspirés des enregistrements. L’Ecossais Erland Cooper a bricolé un nouvel instrument avec une branche d’arbre et une corde de violoncelle avant de s’immerger parmi les chants d’oiseaux. L’Anglo-Japonaise Hinako Omori a combiné des extraits sonores sélectionnés parmi ceux qui représentent l’Australie, le chuintement de ses synthétiseurs et ses propres enregistrements de terrain. Le beatboxer Jason Singh a dialogué avec des lémuriens de Madagascar et des oiseaux de la Maasai Mara National Reserve.
« Nous sommes en train de commander de nouvelles œuvres » glisse Sarah Bird. Elles seront probablement jouées au prochain Timber Festival. L’événement est encore lointain : il aura lieu les 7, 8 et 9 juillet 2023 à Feanedock, dans la « National Forest », une forêt récente, plantée dans les années 1990 sur 520 kilomètres carrés, entre Birmingham et Nottingham. Mais, avec son épatant panachage de bonne humeur, d’art forain, de rencontres, de musiques inouïes et de décors exubérants juste sous les arbres, il donne dès maintenant envie de réserver un ticket…
Photo de têtière : François Mauger
Pour aller plus loin... La sound map du Timber festival Le site web du Timber Festival