Le Rêve de l’aborigène, un festival sous les radars

Chaque printemps, quelques médias publient une liste de festivals « verts ». Généralement, ce sont toujours plus ou moins les mêmes : We Love Green (à Paris), le Climax festival (à Bordeaux), le Delta Festival (à Marseille), Terres du son (à Candé, dans l’Indre-et-Loire), le Cabaret Vert (à Charleville-Mézières)… Jamais on n’y retrouve le festival international de la musique des plantes, ce qui peut s’expliquer par son caractère intimiste. Mais que le Rêve de l’aborigène ne soit jamais cité est un mystère. Voilà un festival qui réunit chaque année au milieu du mois de juillet 8 000 spectateurs entre Poitiers et Nantes, « dans le respect de la nature et de l’humain ». L’un de ses représentants présente cet événement qui gagne à être connu…

Comment est né le Rêve de l’aborigène ?

Manuel Peignelin : « Trois personnes sont à l’origine de ce festival : Freddy et sa compagne, Dominique, ainsi que leur ami Sylvestre. Lors d’un voyage en Italie, ils ont découvert un festival très original. Ils ont eu un coup de foudre et ils se sont dit qu’il fallait organiser quelque chose d’équivalent. Après avoir fait pas mal de recherches, ils ont trouvé la plaine de Soulièvre, un grand parc à Airvault, au bord d’une rivière. Ils ont créé ce festival en collaboration avec un festival de danses du monde. Ils ont réuni 350 personnes puis, d’année en année, le festival a grandi et a pris son indépendance. Il y a eu de nombreux ajustements, en particulier l’interdiction de l’alcool, qui est arrivée assez rapidement. Aujourd’hui, au bout de 22 ou 23 ans, on arrive à 8 000 spectateurs, ce qui est notre limite. C’est un festival assez familial. L’ambiance est très détendue. Les gens de la sécurité nous disent chaque fois qu’ils sont sûrs de passer un week-end tranquille. Mais, au départ, tout vient du goût des organisateurs pour le didgeridoo. Il a été mis en avant assez rapidement. Se sont greffés ensuite dessus la guimbarde, la flûte, le chant diphonique et d’autres instruments qui viennent des peuples premiers… »

Aujourd’hui, d’où viennent les spectateurs ?

Manuel Peignelin : « Ils viennent vraiment de partout. J’ai croisé des gens de Roumanie, d’Australie… Les gens viennent essentiellement de France, même si un grand nombre de spectateurs vient de Suisse. »

Les artistes que vous programmez se font rarement entendre ailleurs. Comment les choisissez-vous ?

Manuel Peignelin : « En effet, ces artistes sont dans une niche un peu particulière : celle des musiques traditionnelles acoustiques, sans apport d’électronique comme on peut en trouver dans le tribal trance. Parfois, sur des soirées un peu plus dansantes, ils peuvent faire appel à l’électronique. Mais l’idée est quand même de donner à voir et à entendre des cultures assez anciennes. L’an dernier, on a eu beaucoup d’artistes venus de pays étrangers (d’Argentine, de Mongolie, du Congo (pour les Pygmées), d’Australie…). Cette année, des artistes viennent du Japon ou d’Afrique. Il est parfois difficile de trouver un juste milieu entre les artistes qu’on a envie d’avoir et le déséquilibre que peut engendrer un artiste qui a trop de notoriété. Cette année, on aura des représentants du peuple Wayampi, un peuple premier amérindien. »

Vous collaborez d’ailleurs avec l’association Survival…

Manuel Peignelin : « Oui, ainsi que Sea Shepherd et plein d’autres. Le village regroupe entre 50 et 100 associations selon les années. »

Comment votre préoccupation écologique se traduit-elle concrètement pendant le festival ?

Emmanuel Peignelin : « Déjà, on fait attention à l’eau et à la nourriture. On a 450 bénévoles à nourrir et on le fait en bio, en végétarien et en circuit court. On contacte les maraîchers locaux à l’avance et on leur passe des commandes. Tous les restaurateurs signent une charte qui les engage à fournir du bio (on vérifie les factures). Les artisans signent également une charte éthique : les produits qu’ils présentent doivent être fabriqués par eux-mêmes ou issus d’un commerce avec les peuples premiers. On recycle les déchets. On est bien sûr limité par certaines obligations sécuritaires : on ne peut pas, par exemple, utiliser des bouteilles en verre ou des couverts en métal, on a donc parfois recours au plastique. »

Photos : l'équipe du festival (Suyana photographies,Yulika Sève Photographie, Yannick Regard d’ailleurs, Emmanuel Peignelin, Polymorphose.)
Pour aller plus loin...
Le site web du festival

Commentaires

  1. […] « Un festival sous les radars », pour mieux comprendre comment est né le festival et sa programmation […]

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