Le 19 juin 1972, un panneau a été posé sur les bords du Tage, à Tolède : il était désormais interdit de se baigner dans ce fleuve qui décrit une superbe courbe au pied de la ville. Finies les après-midis sur les rives, les rires et les plongeons dont seules des photos jaunies témoignent désormais. Le puissant cours d’eau, qui part des modestes Montes Universales à l’est de Madrid, recevait trop d’impuretés des faubourgs de Madrid, au travers d’une plus petite rivière, la Jarama.
Le 19 juin 2022 marquera le cinquantenaire de l’interdiction officielle. Les musiciens locaux se refusent à souhaiter cet anniversaire. Unis par la Real Fundación de Toledo, ils préparent une compilation qui devrait sortir avant l’été.
Dans les années 1960, Pete Seeger s’était battu pour le fleuve Hudson, qui était alors un dépotoir à ciel ouvert. Avec My Dirty Stream, une chanson parue sur l’album de 1966 God Bless the Grass, il avait réussi à mobiliser ses voisins et des citoyens de tout le pays autour de son rêve : « My Hudson River will once again run clear ». Apparu un an plus tard, Creedence Clearwater Revival s’était notamment inspiré de ce combat au moment de se choisir un nom. La pianiste et chanteuse María Toledo, nominée à plusieurs reprises aux Latin Grammy Awards dans la catégorie « meilleur album de flamenco », le joueur d’orgue Hammond Julián Maeso, la spécialiste de la musique médiévale et séfarade Ana Alcaide, la chanteuse pop Pilar Moxó et bien d’autres artistes de Tolède s’inscrivent dans leur lignée.
Un financement participatif a déjà apporté 25 740 euros à la Real Fundación de Toledo pour l’enregistrement. Il ne reste plus qu’à graver les chansons puis à organiser la soirée de lancement de l’opération de nettoyage du fleuve. Enfin un coup de pot pour le Tage ?
Photo de têtière : François Mauger Photo de Tolède : Gustavo Boulhosa (Pixabay)
Pour aller plus loin... La campagne de financement participatif pour l'enregistrement du disque