L’artiste britannique vient d’annoncer la sortie d’un nouveau disque le 14 octobre prochain. Ce sera son premier album de chansons depuis 2005 et l’album Another Day on Earth. A l’époque, l’épisodique chanteur, plus connu comme producteur de Bowie, U2 ou des Talking Heads, confessait : « Il est désormais très facile de faire de la musique mais les paroles représentent vraiment le dernier véritable problème ». Pourquoi l’ancien claviériste de Roxy Music a-t-il repris la plume ? Pour nous parler de la Terre…
L’album, qui s’appellera ForeverAndEverNoMore (soit quelque chose comme « PourToujoursEtJamaisPlus »), traitera de la crise climatique. Dans un long communiqué, Brian Eno explique : « Comme la majorité des gens – excepté la plupart des gouvernements du monde, apparemment – j’ai réfléchi à notre précaire futur et cette musique est née de ces pensées. Il est peut-être plus précis de dire que j’ai ressenti, et que la musique est née de ces sentiments. Ceux d’entre nous qui partagent ces sentiments sont au courant que le monde change à une vitesse effrayante et que de larges parties sont en train de disparaître pour toujours… ». Il ajoute : « Ce ne sont pas des chansons de propagande pour vous dire ce qu’il faut croire et comment agir. Ces chansons sont à la place une exploration de mes propres sentiments. L’espoir est qu’il vous invite, vous l’auditeur, à partager ces expériences et explorations. Il m’a fallu beaucoup de temps pour accepter l’idée que nous, les artistes, sommes en fait des marchands de sentiments. Les sentiments sont subjectifs. La science les évite car ils sont difficiles à quantifier et à comparer. Mais les sentiments sont au commencement des pensées et les accompagnent sur le long terme. Les sentiments sont la réaction de tout le corps, souvent avant même que le cerveau conscient ne se mette au travail et souvent de façon plus large ».
Le musicien écrit plus loin « Les enfants apprennent par le jeu ; les adultes jouent par l’art. L’art vous donne l’espace nécessaire pour « avoir » des sentiments, mais il est accompagné d’un interrupteur : vous pouvez fermer le livre ou quitter la galerie. L’art est un endroit sûr pour éprouver des sentiments, qu’ils soient joyeux ou difficiles. Parfois, ces sentiments concernent des choses auxquelles nous aspirons, parfois ils concernent des choses que nous voulons éviter. »
Le premier extrait de ce nouvel album est en fait une chanson déjà interprétée sur l’Acropole d’Athènes, en compagnie de son frère, Roger Eno, en 2021. Le ciel était ce soir-là obscurci par la fumée d’incendies lointains. « Je me suis dit : « Nous sommes là dans le berceau de la civilisation occidentale et nous assistons probablement à sa fin » », avait déclaré Brian Eno avant de commencer There were bells, une chanson à la tonalité biblique, voire apocalyptique : « Il y avait des trompes aussi fortes que la guerre, qui déchiraient le ciel / Il y avait des tempêtes et des flots de sang humains / Peu importe, mon amour, attendons que la colombe / Revienne nous dire qu’il y a un havre qui se montre proche / Il y avait ceux qui s’enfuyaient / Il y avait ceux qui devaient rester / Au final, ils ont tous suivi le même chemin ».
Mais tout n’est pas encore perdu et le fondateur d’EarthPercent termine son communiqué par ces mots : « Je suis de plus en plus convaincu que notre seul espoir de sauver notre planète est de commencer à éprouver des sentiments différents à son égard. Il faudrait que l’incroyable improbabilité de la vie parvienne à nous réenchanter, que nous éprouvions du regret et même de la honte pour ce que nous avons déjà perdu, que nous nous sentions exaltés par les défis auxquels nous sommes confrontés et par ce qui pourrait encore devenir possible… En bref, nous devons retomber amoureux, mais cette fois de la nature, de la civilisation et de l’avenir. »
Photo de têtière : Cénel Féchet-Mauger Portrait de l'artiste pris sur sa page Facebook, droits réservés
Pour aller plus loin... Le site web de Brian Eno