Le journaliste Ben Edmonds a consacré un livre entier à l’enregistrement de What’s going on. Ce devrait être la norme. Chacun des grands disques de soul de cette époque (Curtis de Curtis Mayfield, Livin’ for you d’Al Green, Shaft d’Isaac Hayes…) devrait avoir sa monographie. Ce n’est pas le cas, ce qui confirme – si besoin était – que le disque de Marvin Gaye est une exception.
Au début des années 70, Marvin Gaye se sent à l’étroit dans le rôle de séducteur romantique que lui a taillé le studio Motown. Il vient de perdre sa partenaire de scène, la radieuse Tammi Terrell. Les lettres que son frère Frankie lui a envoyées du Vietnam l’ont affecté durablement. Ses amis lui parlent des violences policières. Il décide d’aborder ces sujets sans renoncer aux riches arrangements dont est capable la maison de disques de Détroit.
Un premier single sort, What’s going on, et il obtient un succès inespéré. Un album entier suit, sur lequel figure cet hymne à l’écologie :
« Oh pitié, ai pitié de moi / Ah, les choses ne sont plus ce qu’elles étaient autrefois / Où est passé tout le ciel bleu ? / Le vent qui souffle du nord au sud et à l’est est un poison / Le pétrole a saccagé les océans et les mers / Les poissons sont pleins de mercure… »
Marvin Gaye, Mercy mercy me (the ecology)
La production, signée par Marvin Gaye, est admirable. Ben Edmonds écrit notamment à propos de l’intervention du saxophoniste Bill Moore : « Wild Bill surgit furieusement, rugissant comme un lion en danger, conférant du poids à la musique et un caractère d’urgence au message. Peu de solos ont exprimé autant de choses avec une telle économie de moyen ».
Attention : chef-d’œuvre difficilement dépassable !
Pour continuer… Retrouvez ici notre sélection d’œuvres qui mêlent musique et nature…
Photo : Cénel et François Mauger