« Silence like a cancer grows » (« Le silence croît comme un cancer ») chantaient Simon and Garfunkel. La mélodie était belle mais l’affirmation fausse : c’est le bruit qui enfle chaque année. Tous les audionaturalistes le constatent : il devient pratiquement impossible d’enregistrer un animal en France sans qu’au loin ne résonne un bruit de moteur.
La fin de l’année est l’occasion de revenir sur quelques publications qui nous avaient échappé. Celle qu’a éditée en juillet l’Ademe est particulièrement éclairante sur la question du bruit. L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie est en effet parvenue à calculer son coût social et il est colossal : 155,7 milliards d’euros par an en France.
Par « coût social », l’institution entend les frais sanitaires directement liés au bruit (selon l’OMS, il est en Europe le second facteur environnemental de dégradation de la santé, juste derrière la pollution atmosphérique) et des effets à plus long terme : perte de productivité, dépréciation immobilière… Le calcul est purement comptable et ne prend en compte que l’être humain. Mais il permet de saisir l’importance du phénomène et ses principales causes. La majorité des pollutions sonores est liée aux transports (bruit routier : 52%, bruit aérien : 9%, bruit ferroviaire : 7%). Viennent ensuite les bruits du voisinage (17%) et les bruits occasionnés par le travail (14%).
L’Ademe profite de cette publication pour proposer ses solutions : réduire la vitesse de 10 kilomètres heure sur les voies les plus rapides, multiplier les « Zones à Faibles Emissions », améliorer l’acoustique des bâtiments scolaires, promouvoir une charte « chantier propre »…
Selon l’agence, ces mesures seraient rentables à court terme. L’argument, de toute évidence, est destiné aux décideurs politiques : 155 milliards d’euros, c’est une fois et demi le plan de relance post-Covid ; il serait sage de soutenir les propositions de l’Ademe si elles permettent d’économiser une telle somme. Mais le rapport de l’Ademe parle plus généralement aux musiciens et mélomanes qui, s’ils ignorent parfois le « coût social » du bruit, connaissent bien la valeur du silence…
Photo de têtière : François Mauger
Pour aller plus loin... Consulter le rapport de l'Ademe